Les “inspis mais pas trop”

Voici une liste d’inspirations qui pour le coup n’ont rien à voir avec le Japon médiéval ou l’époque décrite dans le jeu. L’action d’aucun des films qui suivent ne se passe d’ailleurs au Japon. Pour autant, ils sont autant de classiques qui peuvent être très facilement adaptés à l’univers de Tenga, en combinant l’efficacité de leur intrigue avec initiale avec les spécificités de ce dernier pour rendre la partie encore plus mémorable. Certains d’entre eux ont déjà donné lieu à des adaptations informelles, d’autres à rien de plus que quelques notes griffonnées. Mais, même si l’exercice est particulièrement agréable (Le scénario Le quartier barbare est une adaptation de Chinatown), il est peu probable que nous trouvions le temps de rédiger tout ça de façon formelle. Donc si vous voyiez des choses qui vous tentent, n’hésitez pas à vous lancer. Vous aurez au moins un lecteur d’assuré.


La chute – Oliver Hirschbiegel – 2004

La chute raconte les derniers jours d’Hitler dans son bunker. Alors même que ce dernier s’enfonce dans le déni et la folie, la guerre est perdue, tous l’abandonnent et qu’il ne reste guère plus qu’une chose à faire : attendre la fin. Particulièrement polémique de par son sujet et la qualité de son traitement, ce film avait déjà été adapté en scénario pour Qin et, de la même façon, il peut être facilement transposé dans le Tenga, où la guerre est permanente et les sièges fréquents. Pris au piège de l’un d’entre eux, les personnages des joueurs peuvent se retrouver à côtoyer un être moralement monstrueux réduit à l’état de victime par des opposants que l’on sait « moins pires » mais dont les méthodes sont tout aussi définitives. C’est également un contexte rêvé pour voir au-delà des masques, notamment une fois que l’étiquette qui permet à tout le monde de cohabiter tombe en poussière et que grands comme petits sont réellement face à leurs destins.


The dark knight – Christopher Nolan – 2008
Mais aussi : L’homme qui tua Liberty Valance.

The dark knight et L’homme qui tua Liberty Valance sont deux variations d’une même histoire où le personnage principal fait « ce qui doit être fait » mais est finalement très proche de ce qu’il combat et préfère laisser sa place à ceux qui représentent la civilisation et ce dont elle aura besoin à l’avenir. Ces derniers n’ont pas les moyens d’employer la force qui est nécessaire à ce changement d’époque et de se salir les mains, mais si les héros le font pour eux, ils leur permettront de construire le futur dont ils rêvent mais dont ils savent qu’ils ne feront jamais partie.
Tenga se situe à un changement d’époque où plus d’un seigneur prétend faire la guerre pour apporter la paix, et nombre d’entre eux n’aspirent qu’à une société moins guerrière, plus policée et où l’ordre est enfin rétabli. Mais pour en arriver là, il faut passer par mille compromissions, massacres et trahisons. Pourtant, certains visionnaires, bien qu’encore jeunes, semblent avoir le potentiel pour amener ce monde nouveau, mais être trop purs pour faire ce qui est vraiment nécessaire pour y arriver. Les personnages, shinobis, serviteurs ou samouraïs, réussiront-ils à les aider malgré eux ?


Full metal jacket – Stanley Kubrick – 1987
Mais aussi : Il faut sauver le soldat Ryan et Apocalypse Now.

Ces trois films ont en commun d’être des films de guerre, d’être loin de la montrer sous un jour glorieux et d’être de grande qualité. Le premier d’entre eux évoque la formation et les premiers jours sur place, le second une façon d’y faire malgré tout quelque chose de bien même si cela peut entraîner le sacrifice de plusieurs et le dernier une approche des changements qu’elle provoque chez les hommes. Une adaptation au contexte guerrier du Tenga peut se faire sans grande difficulté du moment qu’on justifie un certain esprit de corps. Ainsi, on peut imaginer un groupe de personnage, par exemple originaires d’un même village, embrigadés ensemble pour être formés au maniement du mousquet et se retrouvant ainsi à faire plusieurs batailles d’une même campagne, à évoluer dans leur valeurs, à se confronter à ceux qui sont restés au village et ne les comprennent pas, ou aux nouvelles recrues ou aux changements d’allégeance de leurs supérieurs. Le tout dans un ton très réaliste. Devront-ils ensuite aller accomplir une tâche honorable mais leur demandant un sacrifice, comme aller sauver la vie d’un jeune guerrier perdu dans la zone de front, ou au contraire aller assassiner quelqu’un qu’ils auraient pu devenir ?


Gosford Park – Robert Altman – 2001

Durant les années trente, une partie de l’aristocratie anglaise se retrouve dans un manoir à la campagne pour une partie de chasse. Alors que les étages sont occupés par la bonne société et leurs invités, obéissant à des règles de savoir-vivre bien particulières, le sous-sol est le domaine de la domesticité, un univers aux codes tout aussi complexes. Mais, alors qu’un crime est commis, on mène l’enquête dans ces deux mondes et les relations entre les deux sont loin d’être aussi simples qu’il n’y parait. Avec ces notions d’étiquette, ces différentes strates sociales, ces valeurs à l’aspect un peu surannées et la volonté farouche de montrer les petits travers des uns comme des autres, le scénario de Gosford park peut presque être utilisé tel quel dans Tenga. Si vous êtes joueurs, vous pouvez en plus transformer l’innocente partie de chasse en des discussions diplomatiques impliquant l’avenir de la région.


Heat – Micheal Mann – 1995

Un groupe de criminels voit malgré-lui un de ses forfaits se transformer en bain de sang à cause de l’incompétence de l’un d’entre eux. En parallèle, les choses se mettent rapidement à leur échapper alors qu’un policier commence à les suivre de plus en plus près. Mais, après une rapide rencontre avec ce dernier, le chef s’aperçoit que les deux hommes se ressemblent énormément, sont tous les deux un peu dépassés par le monde qui les entoure et feront tout pour faire ce qu’ils doivent faire, quel qu’en soit le prix. La thématique des ennemis qui ne se détestent pas, s’estiment au contraire, et ne doivent le fait de s’opposer qu’à la fatalité et à leur caractère qui les force à accomplir leur devoir jusqu’au bout, faute de quoi ils se renieraient et n’auraient plus aucun mérite l’un pour l’autre, et également très présente dans la dramaturgie japonaise. Un peu avant Tenga, on peut citer la rivalité entre les généraux Takeda Shingen et Uesugi Kenshin. Un peu après, celle entre les sabreux Miyamoto Musashi et Sasaki Kojirô.


Internal affairs – Wai Keung Lau, Alan Mak – 2002
Mais aussi : Les infiltrés.

Egalement basé sur l’opposition de deux personnages se ressemblant beaucoup et sur le fait de ne plus savoir où sont ses valeurs, Internal affairs (et son remake américain Les infiltrés) raconte l’histoire d’un duel que se livrent à distance un flic infiltré chez les bandits et un bandit infiltré chez les flics. Mais à force de prendre la peau de leur adversaire, le policier perd sa foi et sa vocation, aspirant à reprendre le cours de sa vie et le criminel tente de se débarrasser de son passé et de rentrer dans le rang. Après avoir tenté de se démasquer mutuellement, les deux arrivent malgré-eux à une situation qui les avantage mutuellement, mais ils réalisent alors qui ils sont et doivent désormais s’affronter.
Typiquement, ce scénario s’adapte très facilement à tout ce qui suit une organisation clanique (samouraïs, shinobis, etc.). Il serait sans doute très efficace avec des personnages issus d’un même village et partagés entre le service d’un clan de samouraïs et une insurrection rebelle voisine.


Le labyrinthe de Pan – Guillermo del Toro – 2006

Témoin impuissant des horreurs suivant la guerre d’Espagne, de la maladie de sa mère et de la violence de son beau-père, une jeune enfant se réfugie dans un monde peuplé de créatures féeriques aussi belles qu’effrayantes, reflétant la cruauté à laquelle elle est confrontée au quotidien. Même si ce serait dommage de le réduire à ça, on pourrait décrire ce film comme une version particulièrement sombre d’Alice au pays des merveilles ou l’accent est mis sur le fait de se prendre en main et de ne pas hésiter à résister ou à désobéir. Le parallèle avec le quotidien à l’époque de Tenga et avec les monstres étranges que sont les yôkais est particulièrement aisé. Reste le plus difficile : réussir à le faire avec autant d’élégance et si peu de lourdeurs que le film original…


Léon – Luc Besson – 1994
Léon est un tueur à gages travaillant pour la mafia qui protège la fille de ses voisins du massacre qui emporte tout le reste de sa famille. Ne sachant que faire de l’orpheline, il lui apprend la seule chose qu’il sait faire : tuer. Mais rapidement, les policiers ripoux qui sont à l’origine de la tuerie retrouvent leur trace et tentent de les tuer. L’issue de la confrontation semble laisser peut de place au doute, mais ce n’est pas une raison pour ne pas se battre jusqu’au bout.
Pour un petit groupe de joueurs, Léon pourrait devenir un shinobi renégat et solitaire s’attachant à un personnage plus jeune à qui il apprend ses secrets mais dont l’inexpérience et le manque de discrétion amène l’ancien clan de son mentor à s’en prendre à eux.


Lifeboat – Alfred Hitchcock – 1944
Ce film raconte les péripéties d’un groupe de neuf naufragés durant la seconde guerre mondiale. Malgré la période, il ne s’agit pas de militaires mais des passagers ou du personnel d’un paquebot faisant la traversée de l’Atlantique coulé par un sous-marin allemand. Chacun d’entre eux représente à la fois l’attitude d’un des états pris dans le conflit et une des couches de la société américaine, du capitaine d’industrie au domestique noir. Véritable « huis-clos à l’air libre », le film prend une tournure particulière lorsque les personnages s’aperçoivent que l’un d’entre eux est un marin allemand, et le seul capable de naviguer.
Dans une société japonaise remplie de codes, de castes et où le statut à une telle importance, voire ainsi un groupe de personnages n’ayant d’autres choix que de faire voler ces codes sachant que celui qui a les clés du salut de tout le monde a aussi celle de leur perdition ne peut annoncer que du bon.


Un lion en hiver – Anthony Harvey – 1968
Le roi Henry II organise sa cour de Noël à Chinon, en France, et y convoque sa femme Aliénor, qu’il retient prisonnier depuis des années car s’opposant régulièrement à lui, leurs trois enfants, le roi de France et sa maîtresse (qui est aussi promise à son fils et la demi-sœur du roi de France). Mais la réunion de famille n’a rien de festive et tout le monde cherche à intriguer et à obtenir quelque chose, du titre de roi à la mise en place d’une guerre ou l’annulation d’un mariage.
Ce film est un classique à l’ambiance si particulière qui semble difficile de le faire jouer autrement qu’en huis-clos et en refaisant un énorme travail sur l’intrigue pour la « japoniser » sans ni en perdre la puissance, ni la rendre trop dépendante de certains choix de la part des joueurs. Toutefois, il existe de nombreux épisodes historiques propices à une telle adaptation, comme, entre autres, celle entourant la mort de Uesugi Kenshin.


Le parrain – Francis Ford Coppola – 1972
Autant ne pas faire l’injure à de tenter de rappeler à qui que ce que soit de quoi parlent ces films. Tout est déjà par là pour une adaptation et cela en est presque trop facile : structure clanique, figure du père, ambition, vengeance, politique, intrigues familiales, trahisons, etc.







The wrestler – Darren Aronofsky – 2008
Ce film raconte le parcours autodestructeur d’une ancienne star du catch autrefois adulée aujourd’hui réduite à cachetonner et à enchaîner les petits boulots et les combats minables pour joindre les deux bouts. Mais un problème de santé l’oblige a arrêter le catch et à revenir sur sa vie, trouvant le temps de se rapprocher de sa fille et d’une strip-teaseuse dont il est tombé amoureux.
Cette histoire-ci est sans doute un peu plus difficile à adapter car elle tourne essentiellement autour du destin d’un personnage et de sa propre révolte. Il est donc relativement ardu d’impliquer tout un groupe. Toutefois, le parcours d’un ancien lutteur de sumo ou d’un artiste (martial ou pas) n’ayant vécu que pour son art, ayant connu et perdu la gloire, et devant arrêter ce qui a été pour lui le fil conducteur de sa vie, peut donner lieu à un scénario très intéressant et très ancré dans la culture nippone.